Port Cros, les coins à saucisson

Autour du fort

Depuis le port, le tour de l’île débute par une montée pour rejoindre le fort du Moulin. On peut y contempler les îles qui entourent Port Cros : celle de Bagaud, située juste en face, puis, un peu plus loin, le petit rocher du Rascas. Repaires de militaires puis de rats, ils sont interdits d’accès au grand public. Ce n’est pas très grave car ces îlots sauvages présentent au fond peu d’intérêt, sauf si l’on mène des études scientifiques ou que l’on cherche à fuir la police.

La baie de la Palud

Depuis la plage de la Palud, un sentier sous-marin aménagé permet aux randonneurs les plus polyvalents de quitter la terre pour explorer, jusqu’au rocher du Rascas, la faune et la flore aquatiques. Attention si vous effectuez la traversée : pensez à vous munir d’une pochette ou d’un sac hermétique pour transporter votre saucisson durant la nage.

La pointe de la Galère

C’est un des spots de plongée les plus réputés du secteur : jusqu’à la baie de Port Man, les calanques aux eaux turquoises s’enchaînent et invitent les randonneurs à la pause.

Dans les bateaux qui ramènent les visiteurs sur la côte, on peut repérer, chaque soir, deux catégories de randonneurs. Certains sont propres, secs, leur transpiration est légère, subtile, à peine perceptible ; leur regard sérieux tente de contenir une pointe d’amertume. Ce sont les plus disciplinés ; ils ont renoncé à s’arrêter sur les criques, car leur temps de parcours est chronométré par leur montre connectée. D’autres sont couverts de sable, de sel et de sueur, ils ont un air coupable et un pantacourt humide : la courte pause qu’ils effectuaient sur la plage s’est éternisée. En fin d’après-midi, il a fallu rejoindre en courant et dans la précipitation les navettes retour.

La Sardinière

Pour rejoindre la côte sud, le sentier emprunte ensuite une longue portion forestière. Ce n’est pas la partie la plus spectaculaire du parcours, mais l’ombre permet de ralentir le développement des coups de soleil. On peut s’arrêter aux abords de la Sardinière, vieille ferme restaurée en mémoire du passé agricole de l’île.

Port-Cros a connu quelques paysans ; elle a aussi été peuplée par des moines, des soldats, et même des bandits qui y avaient été installés dans l’espoir qu’ils luttent contre les pirates. Mais la présence de ces bandits a finalement occasionné plus de problèmes que celle des pirates.

Les pointes du sud

Après le col des Quatre Chemins, le sentier rejoint les falaises du sud, du haut desquelles quelques belvédères permettent une vue dégagée de la forêt. Dans cette partie éloignée du port, les touristes se font plus rares : avec un peu de chance, on pourra s’octroyer quelques minutes de solitude face à la mer.

Si l’île est sauvage, elle n’a pourtant pas été épargnée par les tumultes des hommes. Au début du siècle dernier, Port Cros a ainsi été l’objet d’un long feuilleton judiciaire. Une certaine Blanche Crotte tenta désespérément de récupérer ses droits de propriété sur l’île, qu’elle revendiquait comme possession de son défunt mari, le Dr Crotte. Elle dut enchaîner les procès durant plus de quinze ans. A l’issue d’un long et éprouvant combat, Dame Crotte finit par obtenir en partie gain de cause.

La plage du sud

Lorsqu’on l’aperçoit au loin, la plage du sud semble offrir un décor parfait : ces mêmes eaux émeraudes bordées de sable fin et de forêt. Lorsqu’on s’approche, il faut relativiser un peu : il y a des cailloux, des algues et des gens. Le port n’est plus qu’à une demi-heure de marche, le site est facilement accessible et donc fréquenté.

Si le temps le permet, c’est l’occasion d’une dernière pause avant d’achever le tour. Les corps fatigués, les pieds mouillés, les regards bercés se laissent aller à des confidences : c’est le moment d’avouer à ses proches à quel point on les aime ou, au contraire, qu’on commence à se lasser d’eux.

Le port

La boucle s’achève par le port et sa rade, seul point de l’île pourvu d’un peu de commerces et de goudron. On retrouve alors les passagers du matin, qui patientent eux aussi sur le quai avant l’arrivée des navettes.

Certains semblent revigorés par leur visite de l’île : leur peau est bronzée, raffermie par l’effort, légèrement salée. D’autres touristes, au contraire, semblent avoir perdu toute leur fraîcheur : ils sont sales, recouverts d’un mélange peu homogène de sueur et de lait protecteur anti-UV qui s’amasse à certains endroits de leur visage pour former des pâtés. Ils attendent, impatients, inquiets de ne pas voir arriver le bateau. Dans un réflexe de survie, certains ont acheté une gaufre ou un soda.